Notre-Dame en feu
C’était à Paris, je promenais mon ennui
À l’heure où le jour résiste encore à la nuit.
Je flânais sur les quais en écoutant la Seine,
Laissant mon esprit folâtrer sans retenue,
Lorsque soudain des cris au sommet de la rue
Me firent presser le pas à en perdre haleine.
Je vois sur le Pont Neuf une foule agitée,
Les regards tournés vers l’Ile de la Cité.
Un nuage de suie flotte sur Notre-Dame
Et déjà des flammes lèchent le toit de plomb
Faisant redouter que s’envole son aplomb.
Ma conscience mesure l’ampleur du drame.
Avec sa cathédrale écornée, me dis-je,
Paris verra, c’est sûr, dépérir son prestige.
Le sinistre grandit attisé par le vent
Et nourri par un chêne âgé d’au moins mille ans.
Des gerbes de feu comme au sommet des volcans
S’évaporent dans l’air, rougeoyant le couchant.
La vigueur du foyer n’épargne ni les toits
Ni la sublime flèche embrasée par endroits.
La foule agglutinée tel un essaim sur l’arbre,
Observe avec effroi l’image trop atroce
Du feu dévorant tout d’un appétit féroce,
Dévoilant sous leurs yeux une scène macabre.
Les soldats impuissants à livrer le combat
Sont comme des marins qui voient fléchir leur mât
Quand la mer déchaînée fait prendre de la gîte.
Nous eûmes peu à languir avant que s’écroule
La divine cime sous les cris de la foule ;
Elle comprend sur le champ que la messe est dite.
Tandis que le brasier dévore la forêt
Le sol s’est embrasé du transept au chevet.
Les flammes poursuivent leur funeste besogne
Esquissant dans les cieux des formes éphémères,
Enfantant un cortège d’horribles chimères
Avec Quasimodo et son horrible trogne.
Notre-Dame fut sauvée très tard dans la nuit
Quand le Diable vaincu à grands pas s’est enfui.
Depuis ce jour sinistre, adieu messe et matines ;
Maçons, tailleurs, peintres, chacun dans son métier,
Sans repos ni ennui, œuvre d’arrache-pied
À polir l’écrin de la couronne d’épines.
Alain HUMBERT
1er février 2024
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